Parlons NATURE - Les mustélidésÉté 2024
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LES MUSTÉLIDÉS

Bonjour à tous !

Feuilles mortes

C'est l'été, il fait beau, il fait chaud ! En plus, il s'agit de la période la plus riche sur le plan de la biodiversité ! J'ai moi-même pu faire une magnifique observation (la photo ci-contre !) dans les dernières semaines, qui m'a inspiré le sujet de ce numéro du Parlons NATURE. Ça, et le fait que ma collègue experte en pistage animalier me rapportait que cette famille animale est peu connue du public. Vous voilà intrigué, n'est-ce pas ?

Suivons ensemble la piste des… mustélidés !

 

Photo : Vison d'Amérique. Crédit: Jessica Bayard, D0.

 

Mustélidés : une famille diversifiée

Commençons tout d'abord par démystifier qui sont les animaux cachés derrière cette famille au nom peu évocateur. Et si je vous disais furet, belette, loutre, ça serait plus clair, non ? En résumé, les mustélidés sont une famille de mammifères de l'ordre des carnivores reconnaissables à leur corps allongé, à leurs courtes pattes et à leurs oreilles arrondies. Ils possèdent également des glandes anales qui sécrètent un liquide odorant utilisé notamment pour marquer leur territoire.

Sans grande surprise vu l'ordre auquel ils appartiennent, ces animaux sont de voraces prédateurs. On les dit carnivores stricts, même si dans les faits il arrive à certaines espèces de consommer des petits fruits et des noix. Malheureusement, les mustélidés sont souvent malaimés des propriétaires de basse-cour, car les petites espèces, capables de s'infiltrer dans les poulaillers, peuvent faire des ravages.

Les mustélidés forment la plus grande famille au sein de l'ordre des carnivores. Au Québec, ce sont 8 espèces que nous trouvons sur notre territoire.

Allons voir qui sont nos mustélidés québécois.

Photos (de haut en bas) :
Martre d'Amérique. Crédit: Matthew de Verteuil, CC BY-NC-ND 2.0.
Loutre de rivière et sa proie. Crédit: Nicole Beaulac, CC BY-NC-ND 2.0.

Les belettes

Tout d'abord, parlons des belettes. Elles sont au nombre de trois espèces dans notre province : la belette pygmée, la belette à longue queue et l'hermine.

Belette pygmée

Pouvant atteindre 50 g tout au plus, la belette pygmée (Mustela nivalis) est la plus petite espèce de l'ordre des carnivores au monde. On rencontre la belette pygmée dans tout l'hémisphère nord. De l'autre côté de l'océan, elle se fait appeler belette d'Europe ou belette commune.

En hiver, son pelage devient entièrement blanc, sauf quelques poils noirs au bout de sa queue, à peine visibles. Cela la distingue de nos autres belettes, dont la queue se termine par un pinceau noir en hiver.

La belette pygmée est rare au Québec, quoiqu'elle pourrait être plus abondante qu'on le pense. Elle est bonne pour passer inaperçue ! Par prudence, on l'a tout de même classée comme espèce susceptible d'être désignée menacée ou vulnérable au Québec.

Belette à longue queue

Plus grande de nos belettes, la belette à longue queue (Mustela frenata) se reconnait à son ventre crème ou jaunâtre et au bout de sa queue noire en toute saison. En hiver, le reste de son corps devient blanc.

Il s'agit du mustélidé le plus largement répandu en Amérique, où on la retrouve jusqu'en Amérique du Sud. D'ailleurs, celles de là-bas ne deviennent jamais blanches (il n'y a pas beaucoup de neige en Colombie, disons !), mais elles arborent une sorte de masque blanc ou jaunâtre sur le visage.

La belette à longue queue est une féroce prédatrice qui s'attaque particulièrement aux petits mammifères. Elle capture environ 3 à 4 proies par jour. Comme nos autres belettes, elle cache ses surplus de nourriture pour plus tard… Un peu dégueu comme garde-manger !

Hermine

Intermédiaire en termes de grandeur entre la belette pygmée et la belette à longue queue se trouve l'hermine (Mustela erminea). Le mâle est beaucoup plus gros que la femelle. L'hermine ressemble beaucoup à la belette à longue queue, mais un ventre blanc immaculé en été confirme son identification. En hiver, distinguer les deux espèces est toutefois plus complexe !

Les gens croient à tort que l'hermine tue par plaisir, car il lui arrive d'éliminer toutes les poules d'un poulailler. En fait, elle cherche plutôt à faire des réserves de nourriture. Réalisant que ses proies sont bien trop grosses pour passer dans le même interstice qu'elle, l'hermine n'a pas le choix d'abandonner sa nourriture sur place. C'est un bien triste spectacle à découvrir, mais ce n'est pas malveillant de sa part.

Fait intéressant, l'hermine est reconnue pour garnir son abri, généralement sous une souche ou un tas de pierres, de poils de souris. On rapporte qu'elle utilise aussi du poil de lièvre. C'est ce qu'on appelle un nid douillet !

 

 

 

 

Photos (de haut en bas) :
Belette pygmée en été. Crédit: Sue Cro, CC BY-NC 2.0.
Belette à longue queue en été. Crédit: Keith and Kasia Moore, CC BY-SA 2.0.
Hermine en été. Crédit: Gertjan van Noord, CC BY-ND 2.0.
Hermine en hiver. Crédit: Fabio Bretto, CC BY-NC-ND 2.0.

Les mustélidés arboricoles

Si les belettes sont plutôt terrestres, nos forêts abritent deux espèces de mustélidés qui passent beaucoup de temps dans les arbres : la martre d'Amérique et le pékan.

Martre d'Amérique

Pouvant dépasser les 60 cm de long, la martre d'Amérique (Martes americana) est un animal de taille respectable. Sa gorge et sa poitrine jaunes ou orangé vous permettront aisément de l'identifier, en plus de sa tête généralement grisâtre, plus pâle que le reste de son corps. Elle a aussi des oreilles plutôt triangulaires, rappelant celles des chats.

Bien qu'elle passe beaucoup de temps au sol, notamment pour chasser, la martre d'Amérique a une prédilection pour les arbres. Ses griffes semi-rétractiles sont d'ailleurs adaptées pour y grimper. On la retrouvera surtout dans les grandes forêts de conifères, en terrain montagneux. Peut-être pourrez-vous détecter sa présence, car il n'est pas rare qu'elle marque les sentiers de randonnée en y déféquant. Charmant !

La martre d'Amérique était beaucoup plus répandue autrefois, mais les coupes forestières et le piégeage ont grandement nui à cette belle créature. Sa fourrure étant très prisée, la martre d'Amérique a été complètement éradiquée de certaines forêts à l'époque. Heureusement, sa population actuelle est en meilleure santé.

Pékan

Notre autre mustélidé arboricole est moins connu et est souvent confondu avec le carcajou. Pouvant dépasser 1 m de long, il s'agit de l'un des plus grands : le pékan (Pekania pennanti). Son pelage est foncé, portant souvent une petite tache blanche sur la poitrine, et sa queue est très touffue. Il n'y a pas si longtemps encore, le pékan était considéré dans le même genre que les martres.

Comme sa cousine arboricole, la martre d'Amérique, le pékan possède des griffes semi-rétractiles pour l'aider à grimper aux arbres. Fait encore plus surprenant, il a la faculté de faire pivoter ses pieds arrière à presque 180° pour descendre rapidement les troncs. Pratique !

Côté alimentaire, le pékan s'ose avec une proie pour le moins… coriace. Je parle de nul autre que du porc-épic d'Amérique. En l'attaquant au visage, il arrive à le tuer et à le dévorer par le ventre pour éviter ses piquants. Il est habile et audacieux, notre pékan !

 

Photos (de haut en bas) :
Martre d'Amérique. Crédit: Allison Gregor, CC BY-NC-ND 2.0.
Pékan. Crédit: Douglas H. Dommedion, CC BY-SA 4.0.

Saviez-vous que…

Il n'y a pas si longtemps, la mouffette rayée (Mephitis mephitis) était considérée comme un mustélidé ?

Il faut dire qu'elle a bien une caractéristique commune à ces derniers : la présence de glandes anales qui sécrètent un liquide odorant. Toutefois, le liquide sécrété par la mouffette sert strictement de moyen de défense, et est beaucoup plus toxique et puissant que celui des mustélidés !

La mouffette rayée a désormais sa propre famille, celle des méphitidés, avec les 9 autres espèces de mouffettes dénombrées. On y trouve également deux espèces asiatiques, nommés blaireaux. Attention toutefois, car la majorité des blaireaux font partie de la famille des mustélidés… Quand les noms vernaculaires nous compliquent la vie !

Photo : Mouffette rayée. Crédit: Hans de Bisschop, CC BY-NC-ND 2.0.

Les mustélidés semi-aquatiques

Après avoir découvert les mustélidés qui aiment les arbres, il est temps de rencontrer ceux qui aiment l'eau : le vison d'Amérique et la loutre de rivière.

Vison d'Amérique

Rappelant la silhouette d'un furet, le vison d'Amérique (Neovison vison) se reconnait facilement à sa fourrure entièrement brun foncé et à l'adorable tache blanche qui décore son menton. Il en a parfois une sur la poitrine aussi.

Bien qu'il y passe beaucoup de temps et qu'il chasse sur terre, le vison d'Amérique n'est jamais loin de l'eau. Il est capable de capturer des poissons à la nage grâce à ses pattes légèrement palmées. Il peut plonger jusqu'à une profondeur de 6 mètres. Pas mal !

Une autre bonne raison de se retrouver à l'eau : se délecter du rat musqué commun, une de ses proies préférées. D'ailleurs, il n'est pas rare que le vison utilise un ancien terrier ou une ancienne hutte de rat musqué ou de castor pour s'abriter. S'il n'en trouve pas, il peut creuser son propre terrier sur la rive.

Loutre de rivière

La loutre de rivière (Lontra canadensis) est, de loin, notre mustélidé le plus aquatique. Tout de l'anatomie de cette géante est adaptée à la vie sous l'eau : sa fourrure dense, ses pattes très palmées, sa queue servant de gouvernail, ses vibrisses (« moustaches ») hypersensibles… Même ses oreilles et ses narines se ferment sous l'eau !

Contrairement au vison d'Amérique, la loutre de rivière chasse sous l'eau. Elle consomme les petits poissons directement dans l'eau, alors qu'elle traîne ses grosses proies sur la rive. Outre les poissons, elle se nourrit d'écrevisses et de crabes, de grenouilles ainsi que des oiseaux et mammifères aquatiques.

La loutre de rivière ne se distingue pas de nos autres mustélidés seulement par son mode de vie aquatique, mais aussi par son organisation sociale. En effet, cet animal est grégaire et peut vivre en petit groupe. Les individus du groupe sont très amicaux entre eux. La loutre est d'ailleurs reconnue pour son tempérament enjoué et énergique. Son jeu préféré : glisser dans la neige !

 
Photos (de haut en bas) :
Vison d'Amérique. Crédit: Nicole Beaulac, CC BY-NC-ND 2.0.
Groupe de loutres de rivière. Crédit: Forest Service Alaska Region, USDA, D0.

Le carcajou

En voilà un animal mystérieux, presque mythique, et j'ai nommé : le carcajou (Gulo gulo). Aussi connu sous le nom de glouton, ce mustélidé, parmi les plus gros au monde, se trouve dans le nord de l'hémisphère nord. N'ayant pas la silhouette typique de sa famille, il ressemble plutôt à un petit ours avec une grosse queue touffue.

Le carcajou est un animal associé aux forêts de conifères, là où le couvert de neige est épais. Bien qu'il puisse chasser de petites proies comme le lièvre d'Amérique, le carcajou est plutôt charognard, se nourrissant des carcasses abandonnées par les autres carnivores, comme le loup gris. Réputé pour sa force et son endurance, cet athlète est capable de traîner des carcasses d'ongulés (caribou, orignal, cerf de Virginie) sur de très longues distances. Le carcajou possède de puissantes mâchoires, capables de déchiqueter de la viande gelée et même, de broyer des os !

Malheureusement, tout porte à croire que le carcajou n'a plus de populations établies au Québec. Les activités humaines, le piégeage, la raréfaction de ses proies et des autres carnivores (dont il dépend pour les carcasses) ainsi que les changements climatiques ont grandement réduit son aire de répartition. Face à toutes ces difficultés actuelles et passées, le carcajou ne semble pas arriver à se rétablir dans la province. La présence de deux individus a bien été confirmée en 2018, mais comme ce charognard se déplace sur de grandes distances à la recherche de viande morte, il est fort probable que ces individus n'étaient que de passage.

En plus d'avoir le statut d'espèce menacée au Québec, le carcajou est un animal à déclaration obligatoire. Si vous trouvez un carcajou blessé ou mort, vous devez le signaler au 1 800 463-2191.

 

Photos (de haut en bas) :
Carcajou. Crédit: Jarkko J., CC BY-NC 2.0.
Carcajou. Crédit: Michiel van Nimwegen, CC BY-NC-ND 2.0.

Le pistage des mustélidés

Comme vous l'avez probablement deviné, les mustélidés ne sont pas des animaux faciles à observer. Vraiment pas. Toutefois, on peut constater leur présence en reconnaissant les traces et les indices qu'ils laissent derrière eux.

Observez bien les traces dans la neige, le sable ou la boue. Comptez le nombre de doigts. Tous les mustélidés ont 5 doigts à chaque pied, qu'il s'agisse de la patte avant ou arrière. Autres caractéristiques à noter : la présentation asymétrique de la trace ainsi que la forme en boomerang du coussinet plantaire (celui de la plante de leur pied). Comme leur type de déplacement favori est le galop, on observera le plus souvent les tracés par paires ou encore par groupement de 3 ou 4 traces. C'est qu'ils sont rapides ces carnivores !

Chaque espèce possède ses propres caractéristiques. Par exemple, le pékan a les pieds très poilus pour se déplacer dans la neige, alors que la loutre a les pieds palmés. Ses pattes arrière sont d'ailleurs très asymétriques, pour l'aider à nager. Sur la photo ci-contre, on peut voir les traces du vison, qui rappellent une forme d'étoile.

Dans la neige, essayez de repérer la trace laissée par un pékan ou une martre ayant sauté en bas d'un arbre. Ou encore, les traces de glisse de la loutre de rivière, lorsqu'elle s'amuse à dévaler les pentes enneigées.

 
Photos (de haut en bas) :
Traces de vison d'Amérique. Crédit: Véronique Dubuc, ©.
Trace d'atterrissage de pékan. Crédit: Véronique Dubuc, ©.

À votre tour maintenant d'aller à la rencontre des mustélidés !

Ce sera une bonne occasion d'en apprendre non seulement plus sur ses animaux vifs et curieux, mais aussi d'apprendre à lire la nature. Et en plus, prendre un bol d'air frais, ça fait toujours du bien !

Ne manquez pas le prochain numéro du Parlons NATURE, l'automne prochain !

Bon pistage !

 

 

(Un gros merci à mon amie et collègue, Véronique Dubuc, pour son expertise en pistage animalier, ses connaissances des mustélidés et ses photos !)

 




Envoyé par Yapla